Une bonne initiative de l'Association canadienne d'éducation de langue française (ACELF) : une banque d'activités…
Qu’est ce que la phonétique alternative ? Quelles activités proposer aux élèves en classe ? Entretien avec Candy Raluy
Le rythme du français se caractérise par :
– une grande régularité syllabique
– accent de durée : allongement de la dernière syllabe d’un mot ou d’un groupe de mots qui fait du sens (mot phonétique)
Ça c’est pour la théorie. Pour la pratique, je distribue des élastiques en caoutchouc à mes étudiants et je leur propose un corpus de phrases à répéter en prenant conscience physiquement de l’allongement syllabique en étirant la dernière syllabe.
Succès assuré !
Entre autres techniques, j’ai trouvé celle de l’élastique, mais lors de mes formations, je vous guide pour trouver vos propres
outils et adapter ceux que vous découvrez à vos dispositifs de formation.
Pourquoi s’inspirer de la rééducation orthophonique pour faire de la correction phonétique ?
Premier constat : à l’âge adulte, nous sommes « sourds » aux phonèmes d’une langue étrangère. Troubetzkoy N.S. parle de
crible phonologique. « Le système phonologique d’une langue est semblable à un crible à travers lequel passe tout ce qui est
dit. » Troubetzkoy N.S. En effet, un hispanophone répétera [u] quand il entendra [y] et à mon avis, expliquer le détail de
l’articulation : la place de la langue, etc., ne sert pas à grand-chose.
La DNP (Dynamique Naturelle de la Parole), est une approche créée par Madeleine Dunoyer de Segonzac qui part du principe
que la parole s’ancre dans le corps. Elle s’inspire de la Méthode Verbo-Tonale de Petar GUBERINA, de l’Anthropologie du
Geste de Marcel JOUSSE ainsi que de la Méthode Artistique de Ginette MARTENOT. Cela permet de lier rythme, corps et
créativité.
Dans mes classes, je m’inspire de nombreux exercices développés par la DNP. L’un d’eux est « le soleil des voyelles » pour
faire sentir la différence d’acuité entre les phonèmes [y] et [u] par exemple. Ce schéma montre l’activité motrice et d’articulation
que l’on peut pratiquer en classe.
Source : Anne Bartoli
On parle comme on respire, on respire comme on parle.
Avec mes étudiants, je liste des corpus de phrases utiles dans la communication quotidienne puis nous les travaillons en
respectant la prosodie et les groupes de souffle. Cette activité fonctionne aussi très bien avec un poème.
Connaissez-vous la méthode Borel-Maisonny ? Cette méthode est employée par de nombreux enseignants du primaire pour
faciliter la lecture et l’écriture en français langue maternelle. Grâce à cette méthode, ma fille est devenue lectrice pendant le
confinement alors qu’elle courait derrière un train en marche à l’école.
Chaque phonème est associé à un geste. Avec un public allophone, je n’utilise que les gestes-phonèmes que l’apprenant a
besoin de travailler. Par exemple, les Japonais et les Coréens n’ont pas d’opposition [ʁ] / [l] dans leur langue. Une phrase du
type : « je consulte mon relevé bancaire » peut s’avérer très difficile. C’est là que la méthode gestuelle associée à la correction
phonétique articulatoire et la MVT (Méthode Verbo-tonale) peut faire des miracles.
Je propose toutes les conjugaisons en mouvement !
Pour le présent de l’indicatif, au système des groupes de verbes (1er, 2e, 3e groupe), je préfère le système des bases phonétiques. Ce système est présent dans « La grammaire des premiers temps », PUG, par exemple et détaillé dans les sites ci-après :
Source : https://toutenfrancais.tv/verbes-a-deux-bases/
Je ne vais pas exposer ici tous mes exercices de conjugaisons en mouvement mais je peux détailler un verbe au subjonctif présent par exemple.
L’idée est de faciliter l’articulation et la mémorisation en faisant appel à la mémoire auditive, la mémoire visuelle, la mémoire kinesthésique et la mémoire affective.
Cela permet aussi de distinguer les verbes « aller » et « avoir » :
ALLER au subjonctif présent
Seulement 3 formes phonétiques à mémoriser :
[aj] (même chose pour je, tu, il, elle, on, ils, elles) [aliõ]
[alie]
La plupart des étudiants ne connaissent pas l’Alphabet Phonétique International. Ils peuvent noter la prononciation avec leurs propres codes et au besoin, faire un dessin pou illustrer le verbe et sa prononciation (« aïe, j’ai mal » / ou encore : « je n’aime pas l’aïl ! »)
⚠️ Il faut penser aux liaisons après les pronoms personnels « nous », « vous », « ils », « elles »
On se met debout, on se met d’accord sur un geste, un mouvement qui exprime le verbe aller et on récite en chœur et en mouvement :
Il faut que j’aille
Il faut tu ailles
Il faut qu’il aille
Il faut que nous allions
Il faut que vous alliez
Il faut qu’ils aillent
Maintenant qu’on a le son, le geste et l’image, on ajoute du contexte.
Je commence : « Cette semaine, il faut que j’aille à la pharmacie pour acheter une bonne crème pour les mains. Mes mains sont trop sèches à cause du froid. » Et toi, et vous ?
Il faut que tu ailles à la Préfecture pour renouveler on titre de séjour ? Et toi ?
Et voilà ! L’air de rien, on fait une activité de communication associée à de la phonétique et à de la conjugaison. C’est très efficace ! Les étudiants adorent ce type d’activité et finissent par créer leurs propres codes et routines.
Voilà ! Avec ces différentes techniques d’enseignement et d’animation de classe, je garde l’attention de tous mes apprenants, je les détache de leur Smartphone, je propose quelque chose de différent qui peut correspondre aux intelligences atypiques. Nous faisons aussi pas mal d’exercices de relaxation, de respiration, de sophrologie et nous dansons souvent en classe. Et ça, ce sera pour un prochain article 😉