Pourquoi parler français ? De nombreuses bonnes raisons ! A partager autour de vous !…
Dans la revue Le français dans le Monde (numéro 429, juillet-août 2020). Par Corentin Biette (Directeur du Café du FLE) et Jacques Pêcheur (Aujourd’hui consultant-expert indépendant pour les questions de langue française. Directeur de la rédaction et Rédacteur en Chef de la revue “Le français dans le monde”, pendant presque vingt ans)
Dans un marché du FLE à l’arrêt, parer au plus pressé s’est traduit par des offres opportunistes de formation ; par un appel généreux à la solidarité et un recours massif et économiquement déstabilisant à la gratuité; par une recherche sauvage d’attractivité, exacerbant et favorisant une concurrence déloyale par abus de position dominante, cassant les prix au mépris de la valeur réelle de l’offre des produits, suscitant une concurrence sans frontières entre les institutions elles-mêmes et déstabilisant pour longtemps, à coups de prix cassés, l’ensemble d’une filière aux entreprises fragiles, en recherche permanente d’équilibre économique.
À côté de ce marché fragilisé, on a vu émerger de nouveaux acteurs por- teurs d’autres approches et d’autres réponses. Et en particulier d’une réponse qui s’affiche comme un impératif : parier sur la différence. Une différence découpée en autant de sites particuliers qu’il y a de professeurs-entrepreneurs pour les faire vivre et les animer. Trois exemples. Répondre à des demandes fines passe par une attention particulière aux besoins et donc par ce qu’on appelle une offre granulaire. Sur le site des Zexperts (https:// leszexpertsfle.com/), cela va des séquences pédagogiques prêtes à l’emploi autour d’une actualité récente ou en devenir (les vacances !) au « Jeu des préfixes » dont la prise de conscience constitue un formidable accélérateur pour l’apprentissage, à une utilisation astucieuse des pictogrammes pour une activité de production dès le niveau A1. Autre approche proposée par ce même site : répondre à des demandes de travailler sur des blocs de compétence : production écrite à partir d’une boîte à récits ; production orale à l’aide de packs de conversation sur le tourisme, le travail, le cinéma, la famille, la santé ou la vie quotidienne. L’interculturel relève d’une éthique de l’apprentissage ; il n’a que peu avoir avec des situations concrètes telles que celles que l’on peut connaître dans le cadre d’un projet professionnel en France, en francophonie ou à l’étranger. L’impératif ici est de « raisonner mondial » : Absolutely French vise un public très spécifique, les conjoints d’impatriés, tous ceux et toutes celles qui ont été contraint(e) s de suivre leur parte- naire pour des raisons professionnelles. Armelle Perben (https:// absolutely-french.eu/) leur pro- pose une approche singulière pour réussir cette impatriation : une intégration immersive qui vise le bien- être et l’autonomie des apprenants : transformer l’apprentissage en expérience de vie. Parier sur la différence, c’est aussi refuser tout tabou dans l’offre d’apprentissage. : des apprentissages « plaisir » peuvent ainsi en côtoyer d’autres à visée plus professionnelle. C’est ce que propose Olivier Crepellière sur son blog Art & FLE (https:// lewebpedagogique.com/) avec une démarche et des convictions fortes : « échapper à l’instrumentalisation des arts par la didactique du FLE » ; « se servir des spécificités mêmes des supports artistiques pour optimiser l’apprentissage d’une langue culture dans une logique d’appropriation et non simplement d’acquisition ».
Pendant que les institutions habillaient leurs discours de numérique, des professeurs entrepreneurs inventaient une économie numérique de l’apprentissage du français dont les expériences mises bout à bout dégagent une véritable méthodologie.
Enseigner le français généraliste sur des plateformes où tous les enseignants se juxtaposent risque de se terminer en guerre des prix. Ce n’est pas souhaitable pour revaloriser le métier. À l’inverse, un professeur pourra se spécialiser. Par exemple, se spécialiser sur un public : les enfants ou les adolescents. Il pourra aussi n’enseigner que le français juridique ou bien le français de la santé. Légitime, expérimenté, le professeur pourra alors conquérir de nouveaux publics qui accepteront de payer le juste prix de cours de qualité.
Un professeur devra tout d’abord bâtir une stratégie de contenus. Par exemple, s’il enseigne le français de l’entreprise, il pourra créer une chaîne YouTube reprenant des situations d’entretien d’embauche, de négociation. Sur Instagram, il pourra expliquer le lexique d’un devis. Sur son blog WordPress, il pourra afficher un exemple de courriel, une correspondance professionnelle. La stratégie de contenus demande d’accepter une traversée du désert, une période ingrate où l’on donne beaucoup à la communauté des internautes alors que l’audience web ne sera que timide au début. Mais au bout de trois à six mois, cette stratégie s’avérera payante : le professeur bénéficiera alors d’une communauté abonnée à ses réseaux sociaux, sa newsletter et ses étudiants valoriseront son travail, sa constance, sa marque et lui-même, en tant que professeur compétent et investi. Pour ceux qui ont besoin de faire connaître leurs cours maintenant et sans attendre, il est pertinent d’utiliser les outils du marketing publicitaire, plus classique, qui obligent à disposer d’un budget, mais efficace. Première étape, pour un bon taux de conversion : clients/visiteurs valoriser son offre sur son site internet. Le professeur qui choisit cette stratégie pourra afficher des témoignages de clients satisfaits, montrer des photos où il/elle en train d’enseigner, proposer une vidéo de bienvenue pour rassurer, proposer des tarifs clairs et un formulaire de contact visible et facile à remplir. Ensuite investir 30 euros dans une publicité Facebook ou Google et déterminer le coût de recrutement d’un contact, puis le coût de recrutement d’un élève inscrit. S’il représente moins de 20 % du prix d’une session de cours, il peut considérer être sur la bonne voie.
Le professeur peut voir ses contenus copiés, mais s’il y a bien une chose qui ne sera pas copiée c’est lui, en tant que personne. Le professeur incarné. Il ne faut donc pas hésiter à jouer le jeu de la médiatisation pour devenir un visage familier pour les futurs apprenants. Être soi-même, une vraie personne, humaine. Ainsi des professeurs youtubeurs ou instagrameurs ont construit des communautés de centaines ou de milliers d’apprenants qui leur permettent d’avoir à coup sûr les inscrits suffisants pour rendre viable leur offre de cours.
Devenir une marque, c’est partir des valeurs de la personne pour qu’elle devienne par alignement les valeurs du service. Par exemple : des valeurs de rigueur, d’expertise ou bien des valeurs de convivialité, de souplesse. Dans un esprit de cohérence, le logo ira dans le sens de ces valeurs, de même que le choix du domaine In- ternet: le choix de sa marque.
La gamification est une très belle porte d’entrée pour l’apprentissage. Duolingo est un succès mondial qui montre qu’on peut créer de vastes communautés en reprenant les codes des jeux. Dans un esprit show télé entre amis, les Instagrams-live animés par un professeur permettent de faire découvrir quelques expressions françaises avec la possibilité d’interagir en direct avec le professeur. Faciliter l’évaluation en ligne Si le service en ligne H5p permet de créer des évaluations interactives, Plickers permet d’évaluer les élèves en classe ou sur Zoom en les faisant répondre en levant un code 2D en papier ou en carton. L’enseignant prend en photo la classe et la correction est faite.
Pour aider à la décision et comparer l’offre, Superprof est un des sites les plus réputés pour proposer ses cours en tant que professeur indépendant. S’agissant des outils de stockage, Google Drive est un très bon outil pour partager les productions écrites des apprenants et pouvoir annoter facilement leur travail. Dropbox est un outil de stockage, très fiable et ordonné. Il permet notam- ment, via l’application smartphone de scanner et stocker facilement tout document papier: document authentique, production écrite à évaluer, formulaire lié au travail…
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