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Retour d’expérience et conseils pour enseigner le FLE à l’université

 

Enseigner le FLE à l’université

Quelles sont les spécificités de l’enseignement du FLE à l’universite ? Entretien avec Amélie Bouquain.

 

Bonjour Amélie, pourriez-vous nous présenter votre parcours?

Je suis enseignante contractuelle au Carré International de l’Université de Caen Basse-Normandie.

Depuis janvier 2013 où j’y donne des cours de Français Langue Étrangère (FLE).
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Il y a 7 ans, lors de mon expatriation en Espagne dans le cadre du programme d’échange Erasmus, j’ai commencé à travailler dans le FLE. Suite à cette première expérience professionnelle dans ce domaine, j’ai eu l’envie de me former. Je me suis alors inscrite à l’Université Stendhal-Grenoble 3, dans le cadre de l’enseignement à distance réalisé en collaboration avec le CNED. J’ai tout d’abord obtenu un Diplôme Universitaire de FLE, puis une Maîtrise et enfin un Master professionnel en Sciences du langage spécialité Français Langue Étrangère. C’est suite à l’obtention de ce Master en septembre 2012, mais aussi grâce à une solide expérience professionnelle, que j’ai pu être recrutée par l’Université de Caen. Par ailleurs, je suis également titulaire d’une Maîtrise en Langues et Cultures Étrangères spécialité Études Romanes Espagnol obtenue à l’Université Toulouse 2-Le Mirail, où je réalise actuellement le Master 2 Recherche.

Comment se déroule un recrutement FLE dans le milieu universitaire? Etait-ce différent lors de vos expériences précédentes?

Le recrutement FLE en milieu universitaire est très différent des recrutements dans le privé.

Tout d’abord, le niveau minimum requis pour pouvoir postuler est Bac+5, c’est-à-dire être titulaire d’un Master 2 FLE, alors que beaucoup de centres de langues privés en France et à l’étranger recrutent au niveau Maîtrise/Master 1 FLE et rarement au niveau doctorat.

Lors du recrutement, il était demandé d’envoyer un dossier comportant une lettre de motivation, un curriculum vitae et une copie des diplômes. Une date limite de dépôt des dossiers était précisée. Par ailleurs, il nous était signalé que les candidatures seraient examinées par une commission de sélection et que seuls seraient convoqués à l’audition (nom donné à l’entretien en milieu universitaire) les candidats retenus par cette commission.

L’audition a lieu devant une commission, dont le nombre de personnes peut varier selon les universités. Elle se déroule en deux parties: un exposé oral (parcours, expériences professionnelles, intérêts et compétences pour le poste à pourvoir) d’une durée d’environ 10 min, et est suivi d’un entretien avec les membres de la commission (questions) également d’environ 10 min. Il faut savoir que l’utilisation d’un PowerPoint pour l’exposé oral tend à se généraliser.

Pour ce qui est de l’entretien avec les membres de la commission, des questions diverses sont posées, certaines dans le but d’approfondir un ou plusieurs points de l’exposé oral, d’autres plus spécifiques peuvent porter sur des pratiques de classe (pédagogie), sur les avancées actuelles en recherche dans les domaines de l’oral ou encore de l’écrit pour l’enseignement des langues, etc. Toutefois, je pense que les questions peuvent être très variables selon le profil des candidats ou encore selon les membres des commissions.

Quelques jours après l’audition, les candidats sont contactés par l’Université qui leur communique la décision de la commission.

Il faut savoir que suite à une audition, les candidats sont classés. Celui classé premier est retenu pour le poste à pourvoir, les autres reçoivent un courrier de l’Université leur indiquant leur classement. Celui classé deuxième peut se voir offrir le poste en cas de refus de celui classé premier ou dans le cadre d’un nouveau recrutement.

Dans mon cas, classée deuxième, j’ai été rappelé quelques mois plus tard par l’Université qui effectuait un nouveau recrutement suite à de nouveaux besoins.

A quel public d’apprenants enseignez-vous? En quoi sont-ils différents de ceux rencontrés lors de vos précédentes expériences professionnelles ?

Jusqu’à maintenant, j’avais principalement enseigné à un public d’adultes ou de jeunes adultes qui souhaitait apprendre le français pour différentes raisons: apprendre une deuxième langue étrangère en plus de l’anglais et continuer à se former face à la demande croissante en milieu professionnel de la maîtrise de langues étrangères, afin de voyager dans des pays francophones, mais aussi pour pouvoir travailler en France, ou encore par loisirs, etc.

A l’Université de Caen, nous sommes face à un public composé majoritairement d’étudiants. Ce sont généralement des personnes qui ont déjà un certain niveau d’études dans leur pays et qui souhaitent suivre un cursus en Master ou encore en Doctorat en France. Certains d’entre eux ont même obtenu une bourse pour venir étudier en France. Ces étudiants suivent une formation en français à temps complet (une vingtaine d’heures par semaine) lors de cours en journée.

Il existe également des cours de soutien linguistique qui ont lieu le soir. Leur charge horaire est variable selon le niveau (entre six heures et une heure et demie par semaine), plus le niveau est faible plus la charge horaire est importante. Il s’agit de cours de FLE jusqu’au niveau B2 et de cours de FOU (Français sur Objectifs Universitaires) pour les niveaux C1 et C2. Dans ce cas, le public est différent, il peut s’agir d’étudiants Erasmus, d’assistants, de chercheurs, de salariés, etc.

Quels sont les spécificités de la manière d’enseigner en milieu universitaire?

Contrairement au privé, en milieu universitaire l’enseignant est rarement un enseignant “généraliste” qui prend en charge un groupe d’apprenants sur une longue durée, qui s’occupe de l’enseignement de toutes les compétences.

A l’Université de Caen, chaque enseignant FLE est amené à intervenir sur un champ spécifique. Pour chaque groupe, un enseignant donne les cours de français écrit, un autre ceux de français oral, encore un autre anime un atelier, un autre donne les cours de phonétique ou de civilisation, etc. Cela dépend des compétences de chaque enseignant. Plusieurs enseignants donnent donc cours à un même groupe pendant un semestre, ce qui implique qu’il y ait une constante communication au sein de l’équipe pédagogique.

universite fle emploi du temps

Le statut d’enseignant en université est-il différent de ceux observés dans les écoles privées.

(volume horaire, mode de rémunération, organisation des congés dans l’année) ?

En effet, le statut d’enseignant en université est bien différent de ceux que j’ai pu observés dans les écoles privées.

Dans le privé, la précarité des enseignants FLE est malheureusement trop bien connue. Trouver un emploi stable en France dans le domaine du FLE est très difficile, puisque les offres d’emploi fluctuent en fonction de la demande. Il y a très peu de demande d’octobre à mars et ensuite une importante demande d’avril à septembre, ce qui implique des CDD de courtes durées rarement à temps complet, une rémunération à l’heure, de longues périodes de chômage, etc. Il faut aussi être très mobile, ne pas hésiter à déménager pour aller où il y a du travail, ce qui n’est pas toujours évident.

De plus, le secteur privé s’appuie sur les stagiaires FLE. Ce sont souvent des étudiants en Master 2 FLE qui doivent impérativement trouvé un stage pour valider leur formation. Dans le cadre de leur stage, les centres privés leur attribuent souvent un maximum d’heures d’enseignement (limitées par convention de stage) et les font travailler sur des projets presque bénévolement, puisque la compensation économique est minime.

Très peu d’universités françaises recrutent des enseignants contractuels, que ce soit dans le domaine du FLE ou encore dans d’autres domaines. Les contractuels, aussi appelés “chargés de cours”, sont souvent des étudiants sous contrat doctoral (dans leur contrat, un quota d’heures d’enseignement est obligatoire), ou encore des ATER (Attaché Temporaire d’Enseignement et de Recherche), à savoir des étudiants en thèse, mais aussi des professeurs associés, c’est-à-dire des enseignants ayant parallèlement une autre activité professionnelle. Il existe encore un autre cas, parfois les universités emploient leurs étudiants en Master (c’est le cas pour les étudiants en langues), les prérequis sont avoir moins de 28 ans et déjà avoir un employeur principal. Toutefois, il me semble que ces derniers n’ont pas le statut de contractuel.

A l’Université de Caen, les enseignants contractuels assurent un service annuel de 384 heures et perçoivent un salaire fixe par mois selon un indice de rémunération. Pour ce qui est des congés, le calendrier universitaire n’est pas suivi, à l’exception des vacances de Noël et de Printemps, les autres congés de chaque enseignant sont organisés.

Pour conclure, quels conseils donneriez-vous à quelqu’un souhaitant enseigner le FLE à l’université?

Je pense que la chose la plus importante est avant tout d’aimer ce métier, car finalement peu importe le contexte dans lequel nous sommes amené à enseigner le FLE, la passion reste la même. Il faudrait peut-être lui dire qu’il ne faut pas avoir peur de bousculer ses habitudes de travail, avoir l’esprit d’équipe, mais aussi avoir l’envie d’apprendre de nouvelles choses, de continuer à se former… Je pense également qu’il est important d’avoir envie de travailler avec ce public universitaire qui a des besoins très spécifiques.

Merci Amélie et à bientôt !

 

 

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